

Syrie: neuf morts, en majorité druzes, dans des affrontements près de Damas
Neuf personnes ont été tuées dans des affrontements à caractère confessionnel dans la banlieue à majorité druze de Jaramana près de Damas, a indiqué une ONG mardi, les autorités promettant de poursuivre les personnes impliquées dans ces accrochages.
Ces violences interviennent un mois après des massacres qui ont visé la minorité alaouite dont est issu le président déchu Bachar al-Assad, renversé par la coalition islamiste qui a pris le pouvoir en décembre.
Selon l'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH), "les forces de sécurité ont lancé un assaut" contre Jaramana, après la publication sur les réseaux sociaux d'un message vocal attribué à un druze et jugé blasphématoire envers l'islam.
L'AFP n'a pas pu s'assurer de l'authenticité de ce message.
L'OSDH, basée au Royaume-Uni mais qui dispose d'un solide réseau de sources en Syrie, a précisé que six combattants locaux de Jaramana et trois "assaillants" avaient été tués.
Dans un communiqué, le ministère de l'Intérieur a affirmé que les affrontements avaient opposé "des groupes armés" avant l'intervention des forces de sécurité, qui se sont déployées "pour protéger les habitants".
Le ministère s'est engagé à "poursuivre" les hommes armés impliqués dans ces accroches, qui ont fait "des morts et des blessés" dont il n'a pas précisé le nombre.
- "Nous avons peur" -
Plusieurs habitants de Jaramana joints au téléphone par l'AFP ont indiqué avoir entendu des échanges de tirs dans la nuit.
"Nous ne savons pas ce qui se passe, nous avons peur que Jaramana devienne un théâtre de guerre", a affirmé Riham Waqaf, une employée d'une ONG terrée à la maison avec son mari et ses enfants.
"On devait emmener ma mère à l'hôpital pour un traitement, mais nous n'avons pas pu" sortir, a ajouté cette femme de 33 ans.
Des combattants locaux se sont déployés dans les rues et aux entrées de la localité, demandant aux habitants de rester chez eux, a dit à l'AFP l'un de ces hommes armés, Jamal, qui n'a pas donné son nom de famille.
"Jaramana n'a rien connu de tel depuis des années". La ville est d'habitude bondée, mais elle est morte aujourd'hui, tout le monde est à la maison", a-t-il ajouté.
Mardi matin, quelques commerces ont ouvert leurs portes mais les rues de Jaramana, au sud-est de Damas, à majorité druze mais compte également des familles chrétiennes, étaient quasiment désertes, ont rapporté des habitants.
Un correspondant de l'AFP a vu des combattants locaux fortement déployés à tous les accès menant à Jaramana. Pour leur part, des forces dépendant des ministères de la Défense et de l'Intérieur étaient déployées sur la route de l'aéroport international de Damas, tout proche, avec des blindés et des mitrailleuses.
- "Attaque injustifiée" -
Dans un communiqué, les autorités religieuses druzes locales ont "vivement dénoncé l'attaque armée injustifiée contre Jaramana (...) qui a visé les civils innocents", faisant assumer aux autorités syriennes "l'entière responsabilité de ce qui s'est produit et de toute aggravation de la situation".
Elles ont dénoncé dans le même temps "toute atteinte au prophète Mahomet" et assuré que le message vocal était fabriqué "pour provoquer la sédition".
Le ministère de l'Intérieur avait pour sa part indiqué qu'il enquêtait sur le message "blasphématoire à l'égard du prophète" Mahomet pour identifier l'auteur et le traduire en justice.
Les druzes, une minorité ésotérique issue de l'islam, sont répartis notamment entre le Liban, la Syrie et Israël.
Dès la chute du pouvoir de Bachar al-Assad le 8 décembre, après plus de 13 ans de guerre civile en Syrie, Israël a multiplié les gestes d'ouverture envers cette communauté.
Début mars, à la suite d'escarmouches à Jaramana, Israël avait menacé d'une intervention militaire si les nouvelles autorités syriennes s'en prenaient aux druzes.
Ces propos ont été immédiatement rejetés par les dignitaires druzes, qui ont réaffirmé leur attachement à l'unité de la Syrie. Leurs représentants sont en négociation avec le pouvoir central à Damas pour parvenir à un accord qui permettrait l'intégration de leurs groupes armés dans la future armée nationale.
Depuis que la coalition islamiste dirigée par Ahmad al-Chareh, qui a été proclamé président intérimaire, a pris le pouvoir, la communauté internationale multiplie les appels à protéger les minorités.
W.al-Yahya--BT